Enregistré le: 16 Novembre 2009, 14:14 Messages: 3138 Localisation: Région de Bordeaux
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Chers amis, Quelle année ! Je n’ai pas d’autres mots. Davantage de soleil, de sorties, de rencontres, beaucoup d’images… Abondance de biens ne nuit pas, c’est vrai, bien qu’à l’heure bienvenue de cet exercice entre amis, ça puisse compliquer la tâche, car j’avais pressenti 5 fois plus d’images qu’il n’en faut. Je ne saurais m’en plaindre, évidemment, même si le choix est difficile, souvent cruel. Quelques mois seront passés sous silence, pour mieux honorer des hôtes de choix, des souvenirs marquants. En plus, 2016 aura été aussi l’année du livre. « Oiseaux migrateurs », fruit de 2 ans de travail est sorti en septembre. Je crois bien que, vers la fin décembre 2015, j’avais rédigé ma lettre au père Noël comme il faut. Car, pour moi, en 2016, ce fût la fête tous les jours ou presque. En me penchant sur ce passé récent, c’est bien entendu de l’oiseau que je vous parlerai bien que parfois j’aime aussi photographier les fleurs, les papillons ou profiter d’une promenade de Sanglier ; tout ce qui touche à la Nature, en somme. L’oiseau … C’est tout un poème. Pour moi c’est un frère, et je lui parle souvent, avec, de plus en plus fréquemment, l’impression qu’il me comprend. En tous cas, il fait souvent ce que j’espère, confiant à me ravir. JANVIER 1- Survol à la pleine mer C’est un rendez-vous habituel chez moi. Les Bernaches Cravant s’approchent à la marée montante, et le spectacle tourne au grandiose si elles acceptent de voler, assez proches pour permettre quelques clichés. Cette petite Oie qui nous vient du froid a fait (en seize étapes) ce long voyage en famille, accompagnée de ses jeunes de l’année que l’on remarque, dès décembre, aux lisérés blancs qui ornent leurs couvertures. Dès que le coefficient de la marée dépasse les 85 ou 90, on peut leur rendre visite au bord de l’Océan. Relativement peu farouche, la Cravant accepte volontiers que l’on soit visible, à condition de rester assis et immobile. Ses cacardages me charment. Les douces et belles lumières de l’hiver font le reste. Le ciel épouse alors l’Océan, et forme, avec lui, un vaste univers de beauté. MARS 2 – Toutes plumes dehors En février, le Grèbe Esclavon était là, presque à portée de main, et c’est un beau souvenir. Mais, question de place, il faut passer à mars. Cette année, le Milan noir, pourtant moins nombreux, a été particulièrement généreux, montrant toutes les facettes de son comportement, des parades à la préparation du nid avec offrandes et accouplements. Bien qu’il ait souvent choisi de rester assez lointain, il a permis aux observateurs de mieux connaître les détails de sa vie. L’appel quasiment permanent de la femelle (y compris lorsque le mâle est déjà posé à ses côtés) qui sollicite visiblement l’accouplement. Les offrandes réussies ou manquées… Probablement manquées en raison de l’égoïsme de Monsieur qui tente de faire passer pour des maladresses bien pardonnables son refus fréquent de partager son butin. Le pardon lui est promis. Il revient bien vite, cette fois-ci les serres vides, mais, pourtant, la Dame ne lui refuse pas son dos. Qui a dit, au fait, que la gourmandise est un pêché ? AVRIL 3 – L’amour chez les Echasses En avril, ne te découvre pas d’un fil dit la sagesse populaire. Cette année, il a fait beau, et il n’était point besoin d’une quelconque écharpe pour rendre visite aux oiseaux. Ce mois, lui aussi, a été bien généreux, avec, très particulièrement, ce câlin d’échasses, si proches que, moi-même, j’ai trouvé le cadrage un peu serré. On ne refait pas, et, finalement, j’ai bien aimé ce gros plan sur l’amour. Il faut choisir, mais je ne saurais oublier pour autant le séjour de la Mouette Mélanocéphale dont la présence m’a comblé, et qui, finalement, a niché pour la toute première fois au Teich et donc en Aquitaine. MAI 4 – Plumet d’or fin L’abondance, la richesse, la plénitude. Les Tadornes combattent, avec douceur toutefois, et nous offrent des images. Tout ceci serait peu dire. Il m’est impossible d’oublier les naissances quasiment en direct des jeunes Avocettes et des jeunes Echasses. Pas plus, d’ailleurs, que les trilles du Torcol qui a fait de son mieux pour susciter l’envie et le rêve. Mais, pour fêter dignement le mai, mois national du muguet, les boules de plumes ont fait également assaut de costumes. Tels ces Combattants variés observés en compagnie de Luna qui, à titre exceptionnel, se sont présentés dans leur tenue nuptiale (fait rare), exploitant, comme par hasard, la seule demi-heure ensoleillée d’une journée en général bien sombre. Et, enfin, le lauréat, mon copain, mon ami, le Grèbe à cou noir qui, contre toute attente, est revenu porteur de son plumet en or. Une première, encore, pour la réserve. Fort de joies pareilles, juin pouvait attendre l’allégresse de juillet. JUILLET 5 – Ivresse du vol Enfin ! Après deux printemps terribles, pour ne pas dire consternants, Merops est revenu. Des heures d’attente, des voyages assez longs, bien des heures de tristesse m’avaient presque découragé. Presque seulement, car si j’avais ressenti un chagrin profond en voyant Merops renoncer, lui dont le courage et l’opiniâtreté ne connaissent pas de limites, en échangeant avec lui quelques larmes, il me restait, au fond du cœur, l’espoir. Cette année, tout ne fût pas aisé pour lui. Des neuf terriers entamés, seuls 2 ont finalement abouti. C’est bien peu, évidemment, mais c’est pour moi beaucoup. Lors d’une journée sans lumière, il avait l’âme volière. Qu’importe parfois le soleil si l’on a l’oiseau, son vol, son élégance et sa joie de vivre. Le ciel un peu gris peut aussi tenir lieu d’écrin à son merveilleux plumage. Ensuite, il a connu le pire et le meilleur. L’un des deux nids achevés a été victime de prédation, probablement de la part d’un mustélidé, si j’en crois les traces de pattes. Jamais je n’oublierai cet oiseau, qui, posé sur une branchette très proche de cette galerie devenue inutile, est resté pratiquement 10 minutes à appeler ses enfants disparus. Qui osera dire encore que l’oiseau n’a pas de sentiments ? Mais, heureusement, il y a eu le meilleur. Le dernier nid était riche de trois jeunes Guêpiers. Malheureusement pour le photographe, il se trouvait à l’ombre. Tant pis pour le photographe ! La vie passe avant tout. Ces jeunes, de plus en plus hardis, se présentaient sur le sable, de plus en plus lointains de ces ombres familières, curieux, joueurs. Nos relations amicales ont fait que j’ai vite compris que la sortie n’aurait lieu que le matin suivant car c’est le matin que les jeunes Merops font le grand saut vers la vie. Il faisait 29° à l’ombre… Mais, avant de les quitter, j’ai eu le droit à une extraordinaire chorale partagée entre les enfants qui appelaient leurs parents de leurs petites voix encore fluettes et les adultes (ils étaient 8, allez comprendre pourquoi) qui a duré une demi-heure. Je suis rentré chez moi à la nuit tombée. Une seule image pour ce mois de juillet, mais des souvenirs, des émotions, qui me resteront en mémoire. AOUT En principe, je ne mets guère les pieds dehors pendant le mois d’Auguste, redoutant l’affluence des touristes. J’ai changé d’habitudes pour cette fois, et rien ne me ferait le regretter. Bien que n’ayant pas particulièrement l’esprit cocheur, je ne pouvais tout de même pas négliger la présence d’un oiseau rarissime en France, le Pluvier Fauve. Ces rencontres ont commencé un peu dans la douleur. L’oiseau, fraîchement arrivé, récupérait d’un long voyage. Fatigué, voire plus, il dormait, lointain, caché dans les herbes, rasé comme on dit, tout simplement couché. Trois heures de patience n’y firent rien, quand bien même, de temps à autre, ce Pluvier se levait, pour entretenir son plumage, prouvant que c’était bien lui. Déçu tout de même, je ne savais pas encore que son séjour allait durer trois semaines. Vous vous en doutez, j’ai couru à la première occasion de le retrouver. La chance a été double : l’oiseau était bien là, mais de plus, il arborait encore une belle partie de son plumage de noces. Plusieurs séances de 5 heures de tête à tête ont suivi… Familier, proche, et beau, Le Pluvier fauve est fier, et il a bien raison. 6 – Fier d’être pluvier Après le dernier de nos entretiens, lorsqu’il a décidé de s’envoler vers le Bassin, je me suis disposé à terminer le tour de cette réserve. Le niveau d’eau était très faible et seuls les Moutons semblaient s’en satisfaire. Martin, flèche bleue, passait, revenu de ses ardeurs belligérantes des premiers jours du mois. Le calme régnait. Dans mon dos, une ombre blanche est passée, je l’ai vue d’un clin d’œil. Pensant à mon amie la Garzette, j’ai tout de même porté le regard vers ce proche piquet… Pour voir le Crabier chevelu, posé à 6 mètres. Deux minutes d’un bonheur intense. L’oiseau était somme toute patient et a même entamé une toilette. Au Teich, un seul individu est observé chaque année. C’était l’instant, c’était le jour, c’était le mois, c’était l’année. Le Père Noël avait chargé sa hotte ! 7 – Incroyable Crabier OCTOBRE Septembre m’a gâté aussi avec le Chevalier Sylvain, les immatures du Petit Gravelot. D’autres encore. En dépit de cette réjouissante richesse, Octobre a bien tenu sa place et a été, pour moi, le mois des hérons. Proches, en pleine beauté, ils m’ont comblé. Le Phoenix (comme nous l’avons nommé avec l’ami Roland), autrement dit le Héron cendré, mettait à l’épreuve la patience de son admirateur, lui dont la proverbiale patience est l’aune à laquelle on peut mesurer la sienne. Au bout du temps, il a sorti son peigne pour se faire beau, plus encore. Un autre soir, son petit cousin, le Corbeau de nuit, silencieux comme souvent, a consenti à une courte apparition pour donner à admirer son bel œil rouge. 8 – Un coup de peigne 9 – L’œil rouge du Corbeau DECEMBRE Novembre a été probablement la seule erreur du ciel. Anthracite comme il en a coutume, à l’exception (un aimable paradoxe) du jour de la Toussaint, tellement ensoleillé que même les Chrysanthèmes n’en revenaient pas. C’était probablement pour mieux susciter l’ardeur avant l’arrivée du mois suivant. Décembre a été, pour moi, exceptionnel, et je devrais plutôt dire, extraordinaire. Il y a eu, au commencement, une rencontre amicale avec mon amie la Grive. Un entretien d’exception qui m’a rappelé que, de toutes les techniques d’approche, la meilleure, et de loin, est celle que l’oiseau peut choisir, à sa propre guise, et décide de venir plus près de celui auquel il fait confiance. 10 – Mon amie la musicienne Un tout petit plus tard, un pivert, inattendu, à cet endroit précis, a fait un bref passage, m’honorant plaisamment d’un beau mouvement d’ailes. C’est bon signe, me suis-je dit, sans être sûr encore des merveilles qui m’attendaient. 11 – Sur le départ Depuis des années, j’espérais les Grues. Je les avais rencontrées bien des fois ; en Vendée en des endroits où elles ne sont pas habituelles, puis, plus tard, en Gironde, au-dessus de ma maison, volant haut, ou bien lors de leurs retours au dortoir, dans la très connue réserve d’Arjuzanx. Mais je voulais entrer dans leur intimité, voir et comprendre. Apprendre. Des heures de réflexion m’ont été nécessaires. Des heures de documentation, puis d’observation, et, enfin de nouvelles centaines de kilomètres et des tonnes de patience. Ce fût une victoire sur moi-même, sur ces petits chemins Landais. Une forme de Graal tant cet oiseau est remarquable, élégant, passionnant par ses mœurs. Je dirais sans douter que la Grue sera mon oiseau de décembre. Pour un peu, j’écrivais de l’année… Farouche comme personne, la Grue m’a accordé, parfois, sa confiance. Un élixir d’amour que le Père avait placé dans mes petits souliers a fait le nécessaire. 12 – A tout de suite, l’ami
_________________ Qui se rend au pays de l'oiseau y découvre la sagesse, le courage, la beauté et le rêve.
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