Le confinement nous renvoie dans nos souvenirs par faute de nouveautés et c'est souvent une bonne idée comme nous le prouve Michel avec ces daims et Chris avec "ni queue ni tête". Une petite idée a germé dans ma petite tête de linotte de vous présenter mes dix années de photo animalière. Hé oui, çà fait dix ans que j'ai découvert cette activité qui est devenu une vraie passion avec comme toujours des hauts et des bas.

Tout commence avec un ami de travail qui prend en photo des chevreuils, des marmottes lors de ses balades. Je suis assez vite séduit par la démarche et je décide de l'accompagner. Après 35 ans de secours en montagne à Briançon je pensais tout connaitre de cette montagne qui m'entoure, contre toute attente j'en découvre une autre faite de silence, de furtivité et de discrétion. Je vois pour la première fois des animaux sauvages brouter, se reposer, c'est une révélation.

Comme c'est souvent le cas j'achète mon premier matériel non pas après une recherche minutieuse et pointue, vu que je n'y connais que dalle, mais après les conseils de mon ami. Je commence avec un Pentax K7 et un 300mm f4. Je me souviens qu'à l'époque je trouvais ce 300 énorme ! Moi qui n'avais connu que des tous petits appareils pour emmener en montagne, comme l'excellent Rollei 35S qui était l'appareil de tous les montagnards à l'époque des diapositives.

Toutes photos faites ci-dessous ont été faites en 2010/2011 avec un Pentax K7 et un 300mm f4.

1 - Mes débuts sont balbutiants, j'ai un mal fou à comprendre les inter-actions entre l'ouverture, les isos et la vitesse et mon ami montrera une patience à toute épreuve pour me l'expliquer je ne sais plus combien de fois. Et nous sommes encore très loin de parler des IL et des RAWs. Mais j'ai un petit avantage, je connais toute la zone comme mon jardin et j'ai encore la capacité de le parcourir parfois à toute berzingue, çà aide.
Je commence évidement par le plus facile, les bouquetins qu'on peut approcher à quelques mètres. Et bien sûr les cadrages très serrés propres aux débutants. Sans doute une façon d'exprimer une approche réussie, une petite victoire en quelque sorte.


2 - J'ai aussi la chance de connaitre un autre copain qui fait de la photo animalière depuis une dizaine d'année. Il avait d'ailleurs arrêté de faire de l'escalade pour cette activité. Lui aussi il va me donner plein de conseils techniques et m'indiquer des lieux propices pour photographier telles ou telles espèces selon les saisons.
C'est grâce à lui que je vois mes premiers mouflons sauvages.


3 - Des animaux qu'on croise rarement si on ne les cherche pas. Mais pendant les hivers très enneigés ils peuvent descendre très bas dans les vallées pour trouver de la nourriture dans les adrets. Il faut dire que se sont des animaux introduits pour la chasse qui ne sont pas du tout adaptés aux hivers rigoureux comme peut l'être le chamois.


4 - Mes sorties se succèdent avec plus ou moins de réussites puisque souvent elles se font au petit bonheur la chance. Je découvrirai bien plus tard que çà porte un nom : la billebaude.
Même si je vois plus souvent le "cul" des animaux j'arrive à faire des rencontres parfois sympathiques et d'autres fois atypiques. Comme ce chevreuil plein de cicatrices qui semble s'être sorti d'une sacrée attaque.


5 - Bien sûr pour un montagnard il faut passer par des "incontournables". Ça tombe bien elles ne sont pas difficiles à appréhender. Mais déjà mon copain me parle de belles lumières, de contre-jour, de blancs cramés..... bref il me parle du quotidien du photographe animalier. Je découvre aussi les réveils aux aurores pour ces fameuses belles lumières.


6 - Mes jours de repos, je les passe (encore) en montagne mais à présent le 300 ne me quitte plus. Se sera l'occasion d'immortaliser des rencontres que j'avais déjà faites moult fois. Comme ces hermines qui n'hésitent pas à récupérer le bout de gras du jambon lors d'un casse croûte.


7 - Je me remémore ces rencontres et je retourne sur les lieux pour tenter.... et des fois çà marche.


8 - Un autre incontournable, le chamois. Un peu plus difficile d'approche mais quand on aime....


9 - Bien sûr je dévore toutes les revues qui me tombent sous la main et je constate que les photos primées, les photos qui soulèvent le plus d’enthousiasme sont des plans larges. Mes amis ont eux aussi fait le constat depuis longtemps à ce sujet. Et des phrases comme " Tu vois, un chamois c'est beau, mais un chamois qui court dans la neige ou qui se découpe sur une crête c'est magnifique" trottent vite dans ma tête. Ça murit et c'est vrai que je trouve que mes "gros plans" font un peu (beaucoup) "catalogue La Redoute" et sont assez vite redondants. Du coup j'ose en toute modestie cette nouvelle approche.


10 - Et j'avoue sincèrement que je trouve là une autre dimension à la photo avec un autre facteur : la composition. Tout un programme surtout que je maitrise à peine les bases. Mais bon, qui ne tente rien n'a rien et dans toute pratique il faut se bouger pour ne pas tomber dans la facilité et la lassitude.


11 - Je commence même à faire de l'animalier avec un grand angle !


12 - Mais très vite je me rends compte que la "billebaude" a ses limites. Je vois souvent des sujets installés à des endroits où je pourrais faire des photos magnifiques mais le problème c'est que je n'y suis pas. Très vite l'affût s'impose mais le problème c'est où les mettre. C'est à ce moment là que je me rends compte que la photo animalière n'est pas si simple que çà et que si je veux faire "autre chose" il va falloir quand même se bouger. Il s'en suit des réveils très très tôt pour rejoindre des affûts pas très souvent "bien pensés", des attentes interminables pour rien parce que le vent a tourné, parce qu'ils sont ailleurs parce que plein de choses qui clochent..... et c'est pendant tous ces affûts que je découvre les oiseaux qui m'entourent..... Un oiseau jaune et celui-ci avec cette crête iroquois orange et c'est quoi ce gros truc qui vient de passer !!!!! Je découvre encore un autre monde. Alors que je peine à voir une espèce de mammifère, en quelques heures j'ai vu des dizaines d'oiseaux que je ne connais pas et qui chantent sans que je puisse mettre un nom sur ces chants. Je suis à la fois frustré et émerveillé et la question qui tue arrive "mais qu'est ce que je fous là à attendre ce chevreuil de malheur qui ne viendra sans doute pas".
Voilà comment tout a commencé.....


A bientôt pour la suite

Magistral !!!
3, 6, 9 et 10 sont mes préférées, mais histoire d'en choisir tant toutes me plaisent (même les gros plans des débuts )
Mon coup de cœur pour la seconde de l'hermine en 7

Il y a un machin qui demande FlashPlayer activé avant le début de ton reportage !!! Danger

Je prends le temps de lire, tout à l'heure, et je reviens!

Quel bonheur de te découvrir sous un autre jour, avec des mammifères, et même des Marmottes ( !!!).
J'ai comme toi commencé par les mammifères et ne me suis mis aux oiseaux que bien plus tard mais j'admire la qualité de tes photos à tes débuts "comme tu dis".
Je prends tout de cette série, je mesure le plaisir que tu as eu avec cette nouvelle passion et la chance de l'exercer dans la superbe région qui est la tienne.
Quelle bonne idée ce sujet à cette période, je sens que tu vas (encore) nous régaler Robert, merci d'avance

Cette idée que Michel et Chris ont fait murir en toi est bienvenue! Elle nous permet :
1/ De se rendre compte que tu as commencé comme beaucoup d'entre nous par les gros mammifères et les gros plan .
Puis tu es passé à la billebaude puis à l'affût ,un cheminement classique. Comme toi ma passion des oiseaux est venue avec la frustration de longues attentes aux cervidés pour rien alors qu'à l'époque cela bougeait et chantait autour de moi.
2/ Mais ce qui est moins classique, c'est que nous nous rendons tout de suite compte que déjà a tes débuts et avec du matos aujourd'hui dépassé tu sortais des clichés que avec des années d'expérience on est pas foutu de faire aussi bien ,alors bien sur tu as travaillé ta technique , 100 fois tu t'es remis à l'ouvrage ,tu as peaufiné et peaufiné sans cesse ,mais le talent c'est inné ! Et tes débuts en sont la preuve . Coup de coeur pour la 10;
J'ai envie de dire :vive le confinement qui nous permet ces belles découvertes mais je préférerai quand même et toi aussi un nouveau carnet de route!
Dominique

Chez moi aussi mais que sur le portable. Je pense avoir rectifié le tir mais sans trop savoir ce qu'il s'est passé. Encore une énigme informatique dont je suis incapable d'en connaitre le fin mot. Désolé pour le désagrément.

Merci à vous tous

En effet, ça a disparu, mais pour moi tu n'y es pour rien, c'est plutôt un pb de sécurité sur le Forum

Un début de fil attachant, Robert, qui nous montre pas à pas la découverte, puis l'évolution du photographe, doublé du naturaliste, que tu es devenu. L'évocation des conseils de ton ami te parlant notamment de blancs cramés me rappelle le temps où, à mes propres débuts sur ce forum, dans les années 2011, 2012, tu me disais "... tes blancs..."!
Quant aux images, elles ne démontrent qu'une chose: bien sur il y a l'apprentissage, le travail, la documentation.... mais la qualité est venue vite, voire immédiatement!
Pour ce qui concerne l'éternelle discussion sur le choix du plan serré ou du plan large, je ne pense pas, par contre que le choix du plan serré ne soit qu'une approche de débutant. Il y a des plans serrés -des portraits-, qui sont magnifiques. Et d'ailleurs le portrait est un art à part entière en photographie: pourquoi n'en serait-il pas de même du portrait d'animaux? Des photographes animaliers professionnels se sont spécialisés dans le portrait d'animaux et ils ont eu autant de succès que ceux qui privilégient le "paysage animalier". Je pense que tout ceci est affaire de sensibilité personnelle, voire de mode.

En tout cas, serrée ou non, chacune des images que tu présentes ici est belle, avec un coup de peut-être pour l'hermine, pour l'animal!

un début très prometteur qui nous prouve une foie de plus ton talent qui n a pas changé

Oui tu as raison, je n'aurais pas dû être aussi catégorique.

Mais force est de constater que tous les débutants commencent tous par des plans serrés comme je l'ai fait et comme beaucoup d'entre nous l'ont fait. Ça s'explique facilement, enfin je trouve, parce que pour moi il est bien plus facile de cadrer un oiseau, par exemple sur une branche, où seule la netteté et l'exposition sont à prendre en compte.
Par contre bien placer un sujet dans un grand décor implique de prendre en compte une foule de paramètres pour avoir une photo équilibrée, lisible et agréable à l’œil où le sujet reste le centre d'intérêt et que le décor soit beau sans pour autant lui voler la vedette. Je trouve que c'est très difficile comme photo. D'ailleurs j'en ai très peu qui me plaisent vraiment. Alors que les autres j'en ai des wagons.

Alors bien sûr je continu d'en faire, mais je m'efforce toujours d'éviter ce genre de photos quand c'est possible. Avec les petits passereaux c'est compliqué justement à cause de leur taille. Maintenant que j'ai beaucoup de photos, je m'efforce de montrer "autre chose". A présent il me faut un mouvement dynamique, un beau décor, un nourrissage, une attitude etc..... c'est pour çà que ma production d'images baisse au fil des ans. Je deviens de plus en plus difficile ce qui n'est pas spécialement idéal pour un photographe, je le reconnais.

Ensuite tu me parles de portraits, de professionnels etc.... bien sûr qu'il y a de très belles photos très réussies de plans serrés et même très serrés. Mais il y a "plan serré" et "plan serré". Quand on voit un oiseau qui a le bec qui touche presque le cadre c'est tout de même pas le même travail qu'un plan serré d'un Vincent Munier pour ne parler que du plus connu. Le premier a juste déclenché le second a un peu plus réfléchi, en général çà se voit vite.
La première ne me procure souvent aucune réaction alors que la seconde va me poser des questions. Comment il a fait çà, pourquoi çà me plait alors que d'ordinaire je n'aime pas etc...

Pareil pour les portraits, quand je fais des portraits au 500mm de jeunes Ethiopiennes çà me prends un quart de seconde. Et quand je vois les portraits de Stéphane Lavoué que j'ai découvert en septembre à Douarnenez il y a un gouffre abyssal. Là aussi il faut savoir de quoi on parle.

Il y a un facteur aussi à ne pas négliger en photo animalière, c'est l'approche que l'on fait ou que l'on veut faire de cette pratique. Il y en a qui sont plus naturalistes que photographes et qui de fait vont privilégier le sujet, la forme du bec, les couleurs etc.... ceux là vont sans aucun doute essayer d'être au plus près. Je me reconnais là en voyage quand "je coche".
Et les photographes qui prennent la nature comme modèle et qui se foutent comme d'une guigne que se soit un azuré commun ou un azuré rarissime pourvu qu'il a des flares, des flous etc... et qu'ils arrivent à ce qu'ils recherchent. A chacun sa photo et à chacun son approche. Pour moi tout est bien si c'est bien fait et surtout si tout le monde y trouve son plaisir, c'est bien là l'essentiel.

Mais sur le fond tu as raison, je me répète je n'aurai pas dû être aussi catégorique, désolé.

Lien pour l'expo de Douarnenez : https://france3-regions.francetvinfo.fr ... 47994.html
N'hésitez pas à regarder la petite vidéo, c'est très intéressant pour la démarche.

Merci pour cette rétrospective si agréablement illustrée. Rentrer dans l'intimité d'un passionné c'est quelque chose!
J'ai suivi les discussions qui ont fait suite, c'est intéressant. J'ai vite été voir le lien , c'est vrai qu'il a du talent et une belle maitrise de la lumière.

J'ai découvert avec stupéfaction que tu ne fais de la photographie que depuis 10 ans, et que tu t’intéresses aux oiseaux depuis encore moins longtemps...
Tu as une capacité d'apprentissage hors du commun. (Et je ne compte même pas les papillons.)

C'est exactement ce que je me disais. Dix ans "seulement" dirais-je .

Cela inaugure une suite des plus prometteuse

Hé oui, avant je n'avais pas trop de temps pour çà. Merci de passer par là.

Oui, pour ne pas être trop longue, je n'ai pas également évoqué la question sous l'angle de l'autre des oppositions souvent mises en avant: "naturalistes" vs "artistes", mais j'y ai pensé aussi, car en effet les premiers privilégient souvent les plans serrés, pour rendre au mieux l'attitude, la posture ou le caractère d'un animal, et les seconds les plans larges, dans lequel la faune ou la flore ne servent qu'à valoriser l'esthétisme de la composition.
Mais je vais dans ton sens pour dire qu'en tout état de cause, l'important est que l'image soit belle et réussie.
Je suis allée voir les portraits de Stéphane Lavoué -que je ne connaissais pas- sur le lien. J'ai tout de suite pensé à des tableaux, et en effet, à la fin de la présentation, il est question de peintres flamands du XVIIème siècle. La sélection de portraits proposée est parfaite: on y voit défiler, au travers des visages et attitudes de chacun, toute la gamme des personnalités et des émotions. Et cela rejoint ce qui est dit plus haut!